Comment évolue la situation des espèces exotiques envahissantes en Occitanie?

Objectif

L’introduction et la propagation d’espèces exotiques envahissantes est l’une des principales causes de l’érosion de la biodiversité à l’échelle globale. Prévenir leur installation en milieux naturels et semi-naturels est donc une préoccupation régionale majeure.

Cet indicateur a pour objectif de permettre le suivi dans le temps de la présence des plantes exotiques envahissantes (PEE) en Occitanie. Cet indicateur contribue également à améliorer les connaissances sur l’évolution de la répartition spatiale de ces espèces et sur la dynamique de leurs populations. Par ailleurs, il participe à renseigner indirectement l’état de conservation de la biodiversité du territoire régional.

Il s’inscrit dans la Stratégie régionale pour la Biodiversité au travers du défi 2 « Renforcer la résilience des écosystèmes et des territoires, dans un contexte de changement climatique ».

Résultat synthétique

  • 125 PEE sont présentes en Occitanie en 2021, soit 3% des espèces de flore vasculaire continentale.
  • En 40 ans, le nombre de PEE a plus que doublé sur le territoire régional, avec en moyenne 16 PEE de plus tous les 10 ans.
  • 74% des communes d’Occitanie ont au moins une donnée d’observation de PEE en 2021.
Mouette rieuse

@B. HUYNH-TAN_CBNMed

Contexte

Les PEE sont des espèces végétales, non indigènes, introduites par l’homme et qui ont des impacts à la fois sur les espèces natives (exclusion compétitive, introgression génétique, etc.) et sur le fonctionnement des écosystèmes locaux (modification des cycles biogéochimiques et des réseaux trophiques, etc.) pouvant mener à l'extinction de certaines populations vulnérables d’espèces de manière directe ou indirecte.

Les activités humaines participent à l’introduction (volontaire ou accidentelle) de PEE sur le territoire. Or, la dégradation marquée des milieux naturels, couplée à l’artificialisation croissante du territoire, au changement climatique et aux phénomènes extrêmes, augmente le risque d’installation et de propagation de ces espèces en milieux naturels et semi-naturels. Au-delà des impacts écologiques, les problématiques sanitaires (ex. : allergies au pollen d’ambroisie à feuilles d’armoise Ambrosia artemisiifolia) et/ou économiques (pertes de production et d’usage, surcoût d’entretien et de surveillance, etc.) restent importantes.

La prévention de l’introduction et le contrôle de la propagation des Espèces Exotiques Envahissantes (EEE) sont des objectifs dédiés de la Stratégie régionale pour la biodiversité (SRB) d'Occitanie. En région, deux stratégies régionales relatives aux EEE pour la faune et la flore sont déployées, respectivement par le Conservatoire d’espaces naturels (CEN) d’Occitanie et par les Conservatoires botaniques nationaux d’Occitanie (CBNMed et CBNPMP). Elles comprennent une amélioration en continu des données régionales de répartition des EEE ainsi que des appuis techniques et une coordination pour améliorer l’efficacité des actions de prévention et de gestion des acteurs régionaux.

Résultats

Les plantes exotiques envahissantes

En Occitanie, 22% de la flore (vasculaire continentale) étudiée sont constitués d’espèces exotiques (c’est-à-dire introduites par l’homme en dehors de leur aire de répartition naturelle). Donc plus d’une espèce sur cinq de la région est le résultat d’une introduction humaine, intentionnelle ou non (ou d’une dispersion naturelle en Occitanie à partir d’un territoire où l’espèce était déjà considérée comme exotique). 3% de la flore vasculaire de la région Occitanie sont constitués de PEE, soit 125 espèces végétales

Parmi les 125 PEE de la liste de référence en région Occitanie:

  • 29 sont identifiées comme à forts impacts, à fort recouvrement et largement répandues sur le territoire (« majeures ») ;
  • 34 sont identifiées comme à forts impacts, à fort recouvrement mais encore localisées sur le territoire (« émergentes ») ;
  • 62 sont identifiées comme à impacts modérés, plus ou moins répandues sur le territoire et à recouvrement plus ou moins important en fonction des stations (« modérées »).

De plus, 163 plantes sont considérées comme potentiellement envahissantes (catégorie « alerte »). Enfin, 18 plantes sont absentes du territoire mais leur caractère exotique combiné à leur comportement envahissant sont connus sur d’autres territoires proches ou à conditions écologiques similaires (catégorie « prévention »).

 

Evolution des plantes exotiques envahissantes

Selon les données disponibles, il apparait qu’au cours des 40 dernières années les introductions des PEE ont plus que doublé sur le territoire régional, passant en moyenne de 45 espèces introduites à 109 (actuellement) sur l’ensemble des départements. Depuis 1850, la région Occitanie compte en moyenne 6 PEE de plus tous les 10 ans (sur les 125 PEE étudiées, données 2020). Par contre, il est observé depuis 1980 une plus forte augmentation des introductions en région : depuis cette date, 16 nouvelles espèces sont en effet introduites en moyenne tous les 10 ans.

Limites

Cet indicateur présente l’état des connaissances à un temps donné. Ainsi, 108 493 données, extraites du Système d'information de l'inventaire du patrimoine naturel (SINP) régional et issues des bases de données botaniques des CBN et de leurs partenaires, ont été utilisées pour cette analyse. Cependant, plusieurs facteurs peuvent influer les résultats présentés, et biaiser l’interprétation et les évolutions « observées » dans le temps :

  • L’évolution continue des connaissances sur la flore vasculaire (acquisition, intégration ou validation de données nouvelles ou anciennes, évolution des conceptions taxonomiques, etc.) modifie le jeu de données présent et passé. Le nombre de plantes exotiques connu en région risque ainsi d’évoluer à la hausse dans les années à venir ainsi que le nombre de plantes concernées par des interdictions règlementaires (européenne et nationale) ;

 

  • Le résultat des analyses de risque utilisées pour catégoriser les taxons (catégories PEE : « majeures », « modérées », « émergentes » et catégories PEEpot : « prévention », « alerte ») évolue au grès des connaissances sur l’abondance et la distribution des PEE ainsi que sur leurs impacts à un temps donné. Le nombre de taxons concernés par chaque catégorie est donc susceptible de changer selon les connaissances disponibles et de rendre difficile l’interprétation de comparaisons dans le temps ;

 

  • L’effort d’échantillonnage (nombre de données d’observation disponibles) est lié aux extractions fournies au SINP à partir des bases de données botaniques des CBN et de leurs partenaires : soit 77 616 éléments pour le CBNMed (sur la partie Languedoc-Roussillon) et 30 877 éléments pour le CBNPMP (sur la partie Midi-Pyrénées).

Les solutions

Face aux menaces que représentent les PEE, plusieurs solutions existent et sont mises en place sur la région.

  • La prévention

La prévention est la meilleure façon d’agir pour limiter l’introduction et la propagation des PEE. La Stratégie régionale PEE Occitanie vise, entre autres, à coordonner les actions pour mettre en place un réseau de surveillance et d’alerte, structurer la réaction rapide et le contrôle des stations prioritaires et contribuer à l’amélioration et à la diffusion des connaissances auprès des différents publics cibles.

  • La gestion des espèces

Dans le cadre des actions de gestion, il est important de bien s’approprier l’écologie de l’espèce ciblée, le fonctionnement de l’écosystème impacté, l’expérience acquise au sein de la communauté des gestionnaires, avant de fixer un objectif de gestion. Dans certains cas, les catégories PEE (et PEEpot) peuvent aider à prioriser des actions de gestion, sous réserve d’une étude de faisabilité :

- sur les espèces en catégorie « prévention » lorsqu’un individu est nouvellement détecté sur le territoire (et présent dans les milieux naturels ou semi-naturels) ;

-sur les espèces « émergentes » dans les milieux naturels ou semi-naturels (protégés) ;

-sur les espèces « majeures » et « modérée » dans les milieux naturels ou semi-naturels (protégés) ET présentant des enjeux de conservation ;

-sur les espèces en « alerte », uniquement pour les populations envahissantes (et présentes dans les milieux naturels ou semi-naturels protégés).

 

  • L’amélioration des connaissances

De plus, afin que chaque citoyen puisse agir à son échelle pour limiter l’introduction et la propagation des PEE, il est possible de contribuer à l’acquisition de données d’observations via des outils de sciences participatives, tels que les Missions flore de Tela Botanica sur les PEE des milieux dunaires, forestiers et urbains.

Rédacteurs fiche

Cyril COTTAZ, Conservatoire botanique national méditerranéen (CBNMed)

Louise TURPIN,  Conservatoire botanique national méditerranéen (CBNMed)

Guilhem DE BARROS, Conservatoire botanique national méditerranéen (CBNMed)

Jérôme DAO, Conservatoire botanique national des Pyrénées et de Midi-Pyrénées (CBNPMP)

Sources des données

L’identification des PEE de la région Occitanie se base initialement sur l’étude des espèces exogènes identifiées par le bilan sur la flore vasculaire de la région Occitanie réalisé en 2021 par le CBNMed et le CBNPMP (Cottaz et al., 2021). Le bilan cartographique se base sur l’exploitation des données d’observations disponibles dans la base de données de l’atlas du SINP de l’Occitanie (DREAL Occitanie, 2020).