Suivi temporel des oiseaux communs en Occitanie
Suivi temporel des oiseaux communs
Objectif
Le Suivi Temporel des Oiseaux Communs (STOC) vise à évaluer les tendances d’évolution des populations d’oiseaux communs.
Cet indicateur permet de mieux caractériser les modifications d’habitats qui affectent les oiseaux en région. Ce type de suivi nous renseigne également sur l’impact du changement climatique à grande échelle sur les biocénoses d’Europe de l’Ouest.
Résultat synthétique
Les espèces spécialistes des milieux agricoles montrent un fort déclin, estimé à 23.1% depuis 2001. Ce déclin est constaté partout en Europe de l’Ouest.
Le constat est identique chez les espèces d’oiseaux spécialistes des milieux urbains, déclin estimé à 23.2% en 20 ans.
En revanche les tendances sont à la hausse pour les espèces généralistes (+17.4%) et les spécialistes des milieux forestiers (+19.5%) au cours des vingt dernières années.
Verdier d'Europe @J. Dalmau - GOR
Contexte
La région Occitanie se trouve à la confluence de 4 climats (atlantique, continental, montagnard et méditerranéen), induisant une forte diversité d’habitats. Le cortège des passereaux nicheurs en région Occitanie est donc particulièrement riche en termes de diversité, chaque espèce ayant ses propres affinités en termes d’habitats.
Le STOC-EPS a été récemment choisi par le Ministère de l’Ecologie pour constituer le principal indicateur visant à évaluer la Stratégie Nationale pour la Biodiversité (SNB 2030).
Depuis 2007, le suivi de 293 carrés STOC-EPS réalisé en Occitanie a permis de produire plus de 160 000 données d’oiseaux à travers l’ensemble de la région.
Résultats
Les tendances d’évolution des oiseaux communs, entre 2002 et 2023, présentent de grandes disparités selon les espèces.
Ainsi 14% sont considérées en déclin, 33% stables et 16% en augmentation.
Malheureusement, plus du tiers des espèces contactées ne peuvent être évaluées en raison d’une insuffisance de données (nombre de contacts par an trop faible).
Néanmoins, 50 espèces ont pu être évaluées de façon satisfaisante (test statistiquement significatif).
Tendances sur les affinités des espèces en termes d'habitats
- Espèces spécialistes agricoles
L’analyse des données STOC par cortège permet d’observer une forte diminution des espèces liées aux milieux agricoles, un déclin estimé à 23.1% depuis 2002.
Les raisons de ce déclin sont liées à l’intensification des pratiques agricoles, l’utilisation de pesticides, l’homogénéisation des paysages engendrée par les monocultures, la perte d’habitats (haies, vergers à haute tige) ou encore la disparition des jachères PAC.
Certaines espèces des milieux agricoles accusent un très fort déclin à l’image du Bruant jaune (-81.4% entre 2001 et 2023), du Tarier pâtre (-57.1%) et de l’Hirondelle rustique (-49,5%).
A l’opposé, le Bruant proyer (+53.5%) et l’Alouette lulu (+45,3%) semblent tirer leur épingle du jeu dans un contexte pourtant défavorable.
- Espèces spécialistes urbains
Les espèces spécialistes du milieu urbain accusent un déclin depuis une vingtaine d’années.
Les raisons sont encore mal connues, et certainement multiples : diminution des ressources alimentaires, notamment des insectes, même si, depuis quelques années, les pesticides ne sont plus utilisés dans les espaces verts urbains ; diminution des sites propices à la nidification (perte de cavités due au ravalement des bâtiments et à l’abattage des vieux arbres); pollution.
Parmi les espèces en déclin, citons les Hirondelles rustique (-49,5%) et de fenêtre (-45%) ou encore le Verdier d’Europe (-66,4%).
A l’inverse, le Choucas des tours (+231%) et la Tourterelle turque (+52,2%) connaissent une évolution positive au cours de ces 21 années.
- Espèces spécialistes forestiers
Les espèces spécialistes des milieux forestiers semblent en augmentation (+19.5% depuis 2001), en cohérence avec l’augmentation de la surface boisée en région depuis une cinquantaine d’années.
Parmi les espèces des milieux forestiers, deux montrent des tendances très positives sur les dernières décennies : le Grimpereau des jardins (+43.3%) et le Roitelet triple bandeau (+78.4%).
Ces espèces peuvent se contenter de jeunes boisements contrairement au Troglodyte mignon (-25%) qui est plus exigeant en termes de structure d’habitat et nécessite un sous-bois étagé et frais.
Toutefois, il est important de souligner que, pour d’autres espèces typiquement forestières moins répandues, nous ne disposons pas encore de tendance fiable.
- Espèces généralistes
Les espèces dites généralistes sont également en augmentation globalement (+17.4%).
Sur les 13 espèces identifiées comme généralistes, la moitié présentent une tendance stable. Le Pigeon ramier fait figure d’exception avec une forte augmentation constatée depuis 20 ans. Néanmoins, ce phénomène d’accroissement des espèces généralistes révèle une banalisation croissante des habitats, au détriment des espèces spécialistes.
Les limites
La méthode STOC-EPS s’appuie essentiellement sur des ornithologues bénévoles. De leur implication dépendent la qualité et la robustesse des analyses temporelles. Malheureusement, en Occitanie, le réseau STOC est relativement faible, en particulier le nombre de carrés suivis sur le moyen ou le long terme. Ce facteur influe directement sur la fiabilité des évolutions calculées, rendant « non significative » des tendances calculées pour des espèces peu communes, insuffisamment dénombrées sur les carrés STOC.
Les cortèges d’espèces par habitat sont définis au niveau national ; ils ne sont pas forcément adaptés à nos contrées méridionales. Ils restent cependant globalement informatifs sur les différences de tendances en fonction des habitats.
Les menaces
Les menaces sur les oiseaux sont multiples, infrastructures de transport , serres agricoles, fermes photovoltaïques….
- L’appauvrissement global et banalisation des agrosystèmes (arasement des haies et arbres isolés, monocultures intensives, retournement des prairies permanentes…) ;
- La perte de biomasse disponible dans les échelons inférieurs de la chaine alimentaire : gros insectes, micromammifères, reptiles ;
- L’utilisation massive d’intrants : phytosanitaires sur les cultures et antiparasitaires chimiques sur les troupeaux ;
- La fermeture progressive des milieux ouverts, en particulier les garrigues et maquis, sur le piémont méditerranéen, du fait de la déprise pastorale ;
- L’augmentation importante des prédateurs liés à l’Homme : chien (non tenu en laisse) et chat, en particulier ;
- Le changement climatique, avec des épisodes de sécheresse et de canicule de plus en plus fréquents et intenses.
Les solutions
Selon les situations et les contextes, des solutions existent pour enrayer le déclin des oiseaux :
- Le redéploiement d’un élevage extensif dans les garrigues et maquis du piémont méditerranéen.
- La conservation de la mosaïque agricole et diversification des systèmes agricoles : replantation de haies diversifiées, diversification des cultures, préservation des prairies permanentes …
- La diminution drastique de l’utilisation des intrants agricoles et des antiparasitaires aux molécules les plus rémanentes.
- La sensibilisation des agriculteurs à l’importance des bords de parcelle.
- La limitation de la divagation des animaux domestiques (chiens et chats) dans les milieux naturels ou semi-naturels.
- Le renforcement du suivi STOC en réalisant de nouveaux carrés qui seront réalisés par des ornithologues expérimentés durant au moins 5 ans.
Rédacteur fiche
Fabien Gilot - Groupe Ornithologique du Roussillon.
Données sources
Associations d’Occitanie qui contribuent au suivi STOC-EPS : Ligue pour la Protection des Oiseaux Occitanie (LPO Occitanie), Nature en Occitanie (NEO), Groupe Ornithologique du Roussillon (GOR), Centre Ornithologique du Gard (COGard), Société de Sciences Naturelles du Tarn et Garonne (SSNTG), Groupe Ornithologique Gersois (GOG), Association des Naturalistes Ariégeois (ANA), Association Lozérienne d’Etude et de Protection de l’Environnement (ALEPE).
Centralisation des données LPO.
Traitement des données: MNHN